Tao

par | 30 Mai 2017 | Inspirations

Tao« Rien ne peut répondre à notre questionnement ; rien en tant que forme, réponse spécifique, ne peut nous combler : nous sommes construits sur le manque, sur la carence et ce manque apparait, dans l’ignorance, comme un message exigeant de la toute-liberté, de la toute-disponibilité. Tout est à transformer, tout est à lâcher, tout est à traverser. Ainsi rien -aucun fait, aucune forme mentale ni corporelle- ne peut donner de sens, n’a de signification : il n’y a qu’être. Tout ce à quoi nous donnons sens, tout ce qui nous permet des points d’appui pour notre raisonnement, notre sensation, notre action, ce sont des constructions culturelles. Rien de tout cela n’a de réalité ultime. Chercher, s’orienter cela veut dire écouter en profondeur, assister à tout ce qui se présente, et aussi tenir compte à chaque instant du fait que tout ce qui apparait et fixe la conscience est un piège de la conscience. C’est le sens du Tao, la voie, dont l’énoncé se dénie lui-même : « la voie qu’on peut nommer n’est pas la voie constante. »

Le Te, qu’on traduit par vertu, comme la vertu d’une plante médicinale, c’est l’authentique agissant au coeur de nous-même. C’est au Te que nous laissons la place dans la méditation et il est notre lien au Tao. Cet authentique « passage » présente deux aspects, définis par les deux sens de descente et remontée :

– dans la descente du Tao vers le courant de la vie [densification, manifestation], le Te est le « vrai », l’ « efficace » qui permet d’obtenir un « point de vue » (la conscience personnelle, un destin, une pensée, un terrain…),

– dans la remontée de la substance vers le Tao [dispersion, dissolution], le Te se manifeste par le retournement du regard et de l’écoute vers leur lieu de surgissement. Pensée unique qui retourne vers sa source, écoute et reddition totale, il opère en nous un désinvestissement radical. Dans ce mouvement de remontée du flux de la vie vers l’ultime Tao, le Te joue un rôle proche de celui du témoin dans l’Advaïta Vedanta.

Le taoïsme s’origine dans une intuition surgissant du coeur des paysans, c’est une sagesse populaire et profonde, enracinée et ouverte au ciel. Elle propose les conduites et indications pratiques qui rendent la vie acceptable et bonne. Cela consiste en une réparation constante de soi en tant que terrain indigent, soumis aux désirs et aux peurs. Les premières voies de réparation seront les voies de la vie : le respire, l’aliment, le mouvement, l’écoute du soleil levant et du soleil couchant, l’alternance entre activité et repos, la fréquentation de la nature dans une attitude quasi liturgique… Le sacré est dans le quotidien et les voies immédiates du sacré sont dans les mouvements du corps.

En général on entreprend une démarche spirituelle de façon concertée, personnelle ; pourtant être incarné c’est déjà être engagé dans une voie spirituelle, qu’on le sache ou non : le corps est ici le lavoir où l’Esprit va laver sa Lumière, en sachant qu’ultimement il n’y a ni lavoir ni corps.

Quant à l’énergie, c’est ce qui n’appartient à personne. L’énergie est une, totalement variable et insaisissable. Elle est ce qui dérange parce qu’elle déloge. L’énergie, c’est le lien et ce lien est insaisissable, une naissance et une mort à chaque instant reconduites et d’où sourd l’élan de vie… »

[…] note de la rédactrice

Extraits d’une interview de Jean-Marc EYSSALET,  auteur et formateur en médecine traditionnelle chinoise.

 

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